Le Medium Tank M4 est le char américain moyen le plus produit, pendant la Seconde Guerre mondiale : près de cinquante mille exemplaires sont réalisés dans des versions très variées. Son surnom de Sherman, lui est attribué par les Britanniques, quand ils reçoivent leurs premiers exemplaires dans le cadre de la loi de prêt-bail, continuant sa tradition de nommer les chars d'origine américaine d'après le nom d'un général célèbre de ce pays. L'US Army adopte par la suite ce surnom, et le Medium Tank M4 est dès lors appelé M4 Sherman. Les Canadiens, par contre, surnomment les leurs Grizzly, et les Soviétiques Emcha.
Conception et début de la production de masse
Le char M4 est le descendant direct de son prédécesseur, le M3 Lee, dont il reprend en grande partie le châssis. Le travail sur le char commence le 29 août 1940, juste après la décision de mettre en production le M3. En mars 1941, une tourelle pouvant embarquer un canon de 75 mm est conçue, et en septembre le prototype T6 est achevé et envoyé au centre d'essais d'Aberdeen. Ceux-ci se révélant satisfaisants, on décide de lancer une production de masse du modèle.
Coupe latérale d'un Sherman M4A4
Coupe latérale d'un Sherman M4A4
Le programme de fabrication implique onze usines, réparties sur tout le territoire des État-Unis. Cependant, le groupe moteur prévu, un V8 Ford de 500 CV, n’en est encore qu’à la fin des essais quand la production des premiers chars s’achève. Pour y remédier, l’armée américaine utilise ce qui existe déjà. Comme pour le M3, plusieurs dérivés utilisant des groupes propulseurs et des techniques de production différents sont donc mis au point. Cette politique permet de diversifier au maximum les sources d'approvisionnement, en particulier des moteurs, et d'utiliser les capacités des usines sans bouleverser leurs techniques de travail. Cette souplesse, associée au fait que le M4 partage beaucoup d'éléments avec le M3, permet un démarrage très rapide de la production, la cadence mensuelle de sortie atteignant mille exemplaires dès la mi-1942.
Cinq versions du char sont donc produites et évoluent en parallèle.
* Les premiers à entrer en production sont les M4A1, qui se caractérisent par une caisse réalisée avec des éléments coulés, dont les arêtes sont moins anguleuses. Il sont motorisés par un moteur issu de l'aviation, le Continental R-975C-1, un neuf cylindres en étoile à refroidissement par air, déjà utilisé par le M3. Les premiers modèles sortent en février 1942, aux usines Lima Locomotive Works, Pacific Car and Foundry et Pressed Steel Car.
* Ils sont suivis en avril par les premiers M4A2 qui, outre le passage à une caisse soudée, bénéficient d'un moteur diesel General Motors de 13,7 litres de cylindrée, le GM 6-71 (en fait un jumelage de deux moteurs de bus Greyhound). Ils sont eux produits par la Fisher Tank Division à Grand Blanc et Pullman Standard Car.
* Les premiers M4, avec une caisse soudée et un R-975, eux sortent en juillet aux usines Lima Locomotive Works, Pacific Car and Foundry et Pressed Steel Car.
* Entre temps en juin, Ford a lancé la production du M4A3, lui aussi assemblé par soudure mais motorisé par son moteur à essence GAA-III refroidi par liquide.
* En juillet apparaît le M4A4, produit par le Detroit Tank Arsenal, émanation du groupe Chrysler, propulsé par un groupe moteur un peu particulier déjà expérimenté sur certains M3, le Chrysler Multi Bank A-57, constitué de cinq moteurs d'automobile à six cylindres en ligne, réunis par leur transmission. La taille de ce groupe a nécessité l'agrandissement du compartiment moteur et les Américains, peu confiant dans sa fiabilité, le destinent uniquement à l'envoi aux termes du prêt-bail.
L'évolution
Les premiers exemplaires de M4 comportent deux caractéristiques issues du T6, qui disparaissent assez rapidement : deux mitrailleuses fixes de caisse M1919A4, réglables en élévation de -6° à +8°, actionnées par le conducteur. Elles sont supprimées dès le 6 mars 1942. Une grande porte latérale sur le flanc de la caisse, servant pour l'accès rapide de l'équipage, est supprimée également.
Les premiers exemplaires sont armés d'un canon M2 de 75 mm, plus court que le canon M3 monté sur le char M3, et qui nécessite le montage de contrepoids au niveau de la bouche pour rester compatible avec la stabilisation gyroscopique de l'armement. Le montage du M3 élimine ensuite le besoin de ces contrepoids. L'affût de canon initial, le M34 est bientôt supplanté par le M34A1 qui, plus large, embarque une lunette directe en plus du périscope de visée de son prédécesseur. De plus, le bouclier de la mitrailleuse coaxiale M1919A4, auparavant indépendant, est rendu solidaire de celui du canon.
À partir de l'été 1942, une nouvelle suspension dite Heavy-duty est montée sur les M4 de toutes versions. La petite roue de retour de la chenille est déplacée sur l'arrière de la bougie, et les ressorts verticaux voient leur diamètre accru de 2,5 cm. Les roues de route à rayons, employées sur les premiers M4A2, disparaissent assez vite au profit de modèles pleins.
Les premiers engagements du char révèlent qu'il a tendance à s'enflammer assez facilement après avoir été atteint par un obus antichar. Après une étude, on attribue ce défaut aux compartiments latéraux de munitions et, pour amoindrir la vulnérabilité, on ajouta une applique soudée de blindage couvrant leur emplacement. Par la suite, la protection de la caisse est entièrement repensée. Les compartiments de stockage de munitions adoptent la technologie du stockage humide, dans laquelle les dix casiers de dix obus sont plongés dans un bac de 140 litres d'eau, additionnée de méthanol comme antigel et d'un produit anticorrodant. De plus, la partie avant de la caisse est entièrement redessinée, l'inclinaison de la plaque de blindage passant de 56° à 47° et son épaisseur de 51 à 64 mm. À cette occasion, les fentes de vision directe du pilote cèdent la place à de nouveaux épiscopes. Ce nouveau char, désigné M4A3(75)W ou M4A3W (le W pour Wet humide, en référence à son système de stockage de munitions), mieux protégé, sert de base aux développements ultérieurs du Sherman.
Les efforts suivants vont porter sur la puissance de feu du M4, qui montre ses limites face aux chars allemands les plus modernes comme les Panther, ou les Tigre. Le premier essai est britannique, avec le montage de leur canon de 17 livres dans une tourelle standard de Sherman. Connu sous la dénomination "Sherman Firefly" (libellule), il est particulièrement réussi, et se révèle déterminant pour lutter contre les chars de la Wehrmacht, au cours des opérations en Afrique et en France. Tant et si bien que même les unités américaines l'adoptent, 80 exemplaires de M4A3 étant ainsi transformés.
Cependant, l'industrie aux États-Unis adopte une autre solution pour sa production, en montant une nouvelle tourelle T23 embarquant un canon de calibre 76,2. Ce dernier, le M1, est de fabrication nationale et non britannique. Les premiers chars M4A1(76)W, armés du nouveau canon apparaissent peu après le débarquement de Normandie, ils sont rapidement suivis par des M4A3(76)W.
Dans le même temps apparaît une version d'appui feu armée d'un obusier de 105 mm, le M10. Bien que fabriqué avec des caisses récentes, avec un glacis incliné à 47°, il est dépourvu pour des raisons de masse du système de stockage humide.
L'aboutissement de la série est la version M4A3E8, équipée de la nouvelle suspension HVVS (horizontal volute spring suspension) où les ressorts agissent dorénavant à l'horizontale. Bien que cette suspension ne lui apporte pas un gain de vitesse sur route, étant combinée avec de nouvelles chenilles plus larges T80 ou T84 elle se révèle plus à l'aise en tout terrain, gagnant le surnom de Easy Eight (le huit facile). Elle est très utilisée à partir de la Bataille des Ardennes et au delà.
SOURCE : wikipedia